mardi 18 septembre 2012

Le début ne laisse-t-il pas présager la fin ?


Chez Hérodote « le début ne laisse pas présager la fin ». Il en est tout autrement pour ce qui me concerne. Ici l’origine de la fuite semble inéluctablement apparaître comme le terminus à venir de cette vaine tentative de repousser la marche du destin. Tout ça pour ça me direz-vous… Partir, fuir à l’autre bout du monde pour tenter d’échapper, ne serais-ce pour quelques mois, à ce qui ne peut être distancé. Une course poursuite où le poursuivant à d’ores et déjà remporté la partie avant même le départ.

L’aventure yucatèque ne débute en effet ni dans la magie des lectures mayas ni dans un quelconque attrait particulier pour la vie tropicale. Elle prend racine dans la farouche volonté de repousser au plus loin des frontières géographiques le bagne formateur duquel je me suis évadé un soir de juillet, obtenant le si rare et si désiré laissez-passer pour devenir à mon tour geôlier de la Grande Institution. 


Dans ce lieu de perdition, où les désirs de liberté s’épanouissent comme dans une cour de prison, l’esprit libre s’abandonne totalement aux joyeuses divagations pour ne point sombrer. Dire, lire, écrire, s’interroger, protester, rêver, aimer pour oublier que le corps reste blessé de devoir désormais marcher au pas.   
L’homme ne devrait jamais cesser de se réinventer, au lieu de ça il courbe l’échine, à l’usine comme à l’école, devant des « maîtres » de fortune qui, à la faveur d’une charge durement acquise, se font eux-mêmes rouages implacables d’une société servile. Ici comme ailleurs l’ordre vaut mieux que la liberté.
    
Et me voilà désormais, et de bon gré, promu au sein du bagne pour services rendus à la Grande Institution. Dans ma course à mes propres illusions je m’imagine déjà comme une sentinelle corrompue, laissant s’échapper subrepticement des murs opaques de la classe un souffle libérateur, qui de brise à tempête contribuera à faire flancher un édifice déjà branlant.

Et pourtant, à la veille de son premier tour de garde, le gardien rêveur déserte au bout du monde. L’herbe sera-t-elle plus verte ailleurs ?    
Le pénitencier lui sera toujours là, dressant sa froide masse par-dessus les illusions de celles et ceux qui ont cru naïvement qu’éducation rimait avec émancipation. Il attendra alors patiemment le retour de son déserteur, comme une compagne fidèle et oppressante qui se chargera en temps voulu de lui rappeler ses devoirs. Un retour au départ, l’éternelle illusion d’une nouvelle renaissance ?

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